Exposition “Cartier” à Londres, aux sources de l’héritage
Dans une approche conjuguant rigueur scientifique et émotion, Cartier expose régulièrement les trésors de sa collection patrimoniale à travers le monde, offrant l’occasion d’une plongée magnifique au cœur de son histoire et de son style. Une nouvelle exposition sobrement baptisée Cartier s’ouvre le 12 avril au V & A Museum de Londres, enrichie de nouvelles acquisitions et de quelques inédits.
Une longévité fondée sur des années de créativité
Les objets exposés au V&A sont issus du patrimoine de Cartier ainsi que d’autres collections privées et de grands clients parmi lesquels la famille royale d’Angleterre, de musées britanniques et internationaux. Parmi les pièces maîtresses de l’exposition, les visiteurs pourront admirer la broche Williamson commandée par la reine Élisabeth II en 1953, serti d’un fabuleux diamant rose de 23,60 carats, un diadème à volutes porté le jour du couronnement d’Elizabeth II, la bague de fiançailles de Grace Kelly avec son impressionnant diamant de plus de 10 carats, l’exceptionnel collier aux deux têtes de crocodile de l’actrice María Félix sertis de plus de 2 000 pierres.
Burmese jade necklace, that belonged to American heiress Barbara Hutton. Cartier Paris, 1934. Jade, rubies, diamonds, platinum and gold. Image courtesy of Cartier
A l’honneur également, un collier de 27 boules de jade impérial, d’une beauté rare et presque émouvante, ayant appartenu à Barbara Hutton (acquis aux enchères en 2014 pour la somme de 24,44 millions de dollars) ou le collier de cérémonie du maharajah de Patiala, une commande incroyable de près de 1 000 carats de diamants qui connut une vie rocambolesque. Des documents d’archives accompagnent le visiteur au fil de la visite pour lui donner des repères dans le temps et décrypter l’évolution des styles du joaillier parisien qui n’a jamais cessé de se nourrir de rigueur graphique, d’épure et d’élégance.
La Collection Cartier, qui regroupe de nombreuses pièces de ce riche patrimoine, exprime la puissance créative de la Maison à travers les époques. Sa constitution a commencé dans les années 1970, avec une recherche méthodique des pièces les plus significatives (musées, collectionneurs, ventes aux enchères… le joaillier n’approchant jamais directement les familles). Secrètement gardée dans un lieu situé à Genève, la Collection comprend aujourd’hui plus de 3 500 pièces dont la plus ancienne date des années 1860. Chaque nouvelle acquisition est rigoureusement authentifiée, documentée par les experts de la Maison et parfois restaurée en interne. Pour entrer dans ce cercle très fermé, qu’il s’agisse d’un objet, d’une montre ou d’un bijou, la pièce doit être emblématique d’un style ou d’une appartenance prestigieuse susceptible de lui donner une aura particulière.
Patiala Necklace, Cartier Paris, 1928. Vincent Wulveryck, Collection Cartier © Cartier
Un héritage d’art, de design et d’artisanat
Plusieurs années ont été nécessaires pour monter l’exposition. Regroupant plus de 350 pièces ainsi que des archives inédites, cet événement hors norme retrace l’évolution de l’héritage de la Maison en matière d’art, de design et d’artisanat depuis le début du XXème siècle. La Maison a choisi cette époque car elle marque un tournant dans son histoire. C’est à ce moment-là que les trois petits-fils du fondateur, Louis, Pierre et Jacques, décident de donner une dimension internationale à leur activité en établissant des succursales à Paris, Londres et New York. Cartier devient ainsi le « fournisseur » de nombreuses cours royales européennes. L’ Angleterre y tient une place de choix , ce que montre amplement l’exposition au V&A. Cartier bénéficie d’un statut privilégié qui nourrira et enrichira au fil du temps sa créativité et son image. Les frères Cartier réussirent à s’introduire aussi auprès des maharajahs pour lesquels ils réaliseront des pièces somptueuses, mais également à la cour du tsar Nicolas II et ils travailleront étroitement avec les Romanov. Cette présence dans l’intimité des rois et des princes de tous les continents permit au joaillier de multiplier ses sources d’inspiration. Il se nourrit alors de la culture de ses clients à qui il apporte, en retour, une interprétation esthétique nouvelle et éclairante de leur propre héritage. Bien que nous n’ayons aucune trace de commande réalisée par Cartier pour les cours impériales chinoise ou japonaise, l’art et la culture anciennes et extrêmement riches de ces pays influenceront toute la période de l’Art déco en Europe. La Maison réalisera les plus belles expressions de cette “Asie rêvée” alors très en vogue.
Lors de l’exposition Cartier et les Arts de l’Islam. Aux sources de la modernité qui s’est tenu au MAD à Paris en 2021 et a attiré 200 000 visiteurs, la Maison a donné un nouvel exemple de ses inspirations lointaines. A travers d’anciens objets, bijoux et documents, elle montrait comment les formes, les couleurs ou les symboliques issus des arts islamiques avaient modelé ses créations.
Scarab Brooch, Cartier London, 1925. Nils Herrmann, Collection Cartier © Cartier
Le style Tutti Frutti est une autre signature majeure du style de Cartier. Lorsque Jacques Cartier se rendit en Inde pour la première fois en 1911, il découvrit ce nouvel art de la glyptique qui consiste à sculpter la pierre. Les bijoux se composent de pierres précieuses gravées en formes de fleurs ou de feuilles. Le V&A en expose un élément particulièrement raffiné, le bandeau commandé en 1928 par Edwina Mountbatten. Aujourd’hui encore, aucune collection de haute joaillerie ne voit le jour sans inclure au moins une parure Tutti Frutti qui révèle des couleurs de pierres extraordinaires et un travail minutieux de taille et d’assemblage qui se chiffre en centaines d’heures d’atelier.
Bandeau in Tutti Frutti style, English Art Works for Cartier London, 1928. Emeralds, rubies, sapphires, diamonds and platinum © Victoria and Albert Museum, London
Sur les traces de la panthère
Il faut « ne jamais copier, toujours créer… l’inspiration peut et doit venir de partout, sauf de bijoux qui existent déjà » disait Jean-Jacques Cartier. L’inspiration ne devait jamais venir des innovations de la concurrence mais de l’observation du monde et en particulier de la nature. Louis Cartier possédait une bibliothèque très fournie sur les inspirations culturelles, architecturales, botaniques et animalières que ses dessinateurs consultaient régulièrement pour trouver de nouvelles sources créatives. Parmi les ouvrages, le remarquable « Etudes d’animaux » de Mathurin Méheut (à voir en ce moment dans l’exposition Dessins de Bijoux au Petit Palais à Paris, jusqu’au 20 juillet 2025) a inspiré les plus beaux dessins de panthère de Charles Jacqueau, qui apporteront une contribution majeure au style de la Maison.
« Etudes d’animaux » Mathurin Méheut, sous la direction de E. Grasset - 1911, Paris, Emile Lévy - Archives Cartier
Dans l’exposition au V&A, le félin est un fil directeur important. Apparue pour la première fois en dessin sur une invitation du joaillier puis déclinée par Jeanne Toussaint, la panthère est devenue une icône. Présente dans toutes les collections de haute joaillerie, visible ou – plus récemment - dissimulée dans un empierrage, elle reste centrale dans les inspirations de la Maison parisienne. Symbole de beauté, de force, de souplesse, son caractère dominant et sauvage est toujours associé à une attitude gracieuse.
Evoquant la broche panthère en diamant et saphir conçue pour la duchesse de Windsor, la directrice de la Collection Cartier Pascale Lepeu a eu cette jolie phrase « C’est notre Mona Lisa ». Allusion au côté un peu mystérieux du félin, à son attitude, emblématique d’une relation sensuelle à la pierre très caractéristique de Cartier et aussi, évidemment, à la taille et à la beauté du saphir cabochon de 152.35 carats sur lequel est juché l’animal. Déclinée et redessinée de multiples fois, l’iconique panthère serait de nouveau à l’honneur à l’été 2025 dans une collection dédiée.
Panthère Brooch, sapphires and diamonds, 1949. Cartier Collection
L’exposition se divise en 3 sections, explorant la créativité et le style, l’ingéniosité technique, le savoir-faire et l’héritage d’une image qui a traversé des décennies tout en s’adaptant pour rester dans la modernité sans jamais s’altérer. Elle met aussi en lumière l’histoire de Cartier Londres et s’achève par une présentation spectaculaire de diadèmes dont certains n’ont encore jamais été présentés au public.
Manchester Tiara, Harnichard for Cartier Paris, 1903. Diamonds, gold and silver; the C-scroll at each end set with glass paste © Victoria and Albert Museum, London.
La Maison Cartier a déjà réalisé 43 expositions internationales.
La Collection a été accueillie par les plus grands musées du monde :
− Petit Palais à Paris (1989)
− Metropolitan Museum of Art à New York (1997)
− British Museum à Londres (1998)
− Museo del Palacio de Bellas Artes à Mexico (1999)
− Kremlin Museums à Moscou (2007)
− Palace Museum de la Cité Interdite à Pékin (2009 and 2019)
− Le Grand Palais à Paris (2013-14)
− National Gallery of Australia à Canberra (2018)
− National Art Center à Tokyo (2019)
− Musée des Arts Décoratifs à Paris (2021)
− Museo Jumex à Mexico (2023)
− Hong Kong Palace Museum à Hong Kong (2023)
− V&A à Londres (2025)
Cartier V&A South Kensington
The Sainsbury Gallery
12 April 2025 – 16 November 2025
Instagram: @vamuseum
Facebook: @VictoriaandalbertMuseum
Tiktok: @vamuseum
X: @V_and_A
Photo de page d’accueil : Tiara, Cartier London, 1937. Aquamarine, diamonds and platinum. Vincent Wulveryck, Collection Cartier © Cartier
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