Cartier et les arts de l’Islam

"Cartier et les arts de l’Islam. Aux sources de la modernité" Le musée des Arts Décoratifs de Paris met en scène 500 pièces, documents d'archive, bijoux et objets précieux de la Maison Cartier inspirés par l’art de l'Islam.

L’exposition « Cartier et les arts de l’Islam. Aux sources de la modernité » retrace les origines des influences des arts de l’Islam en répertoriant les différents motifs et les inspirations qui ont suscité un engouement très fort chez Cartier.
Elle est coproduite par le Musée des Arts Décoratifs de Paris et le Dallas Museum of Art, avec la collaboration exceptionnelle du musée du Louvre et le soutien de la Maison Cartier.

Cartier et les arts de l’Islam. Aux sources de la modernité.

Musée des Arts Décoratifs – 107, rue de Rivoli – Paris
Du 20 octobre 2021 au 10 février 2022

Plus de 500 pièces sont à découvrir dans une exposition exceptionnelle servant d’écrin aux bijoux et objets précieux de la Maison Cartier inspirés par l’art islamique. L’exposition retrace les origines des influences des arts de l’Islam en répertoriant les différents motifs, géométriques ou inspirés de la nature, qui ont suscité un engouement très fort chez Cartier.
Des créations emblématiques du joaillier français sont mises en regard de chefs-d’œuvre des arts de l’Islam. Dessins, livres, photographies et documents d’archives donnent à ces trésors de haute joaillerie un sens autant qu’une perspective historique et culturelle, comme le précise Olivier Gabet, le directeur du Musée des Arts Décoratifs
Cette grande richesse patrimoniale permet de comprendre l’important impact de la découverte des arts de l’Islam sur la Maison au début du XXème siècle et de resituer la Maison Cartier dans le courant artistique d’une époque dont elle est à la fois un témoin et un acteur majeur.

A l’orée du XXème siècle, un nouvel attrait pour l’Orient

Le début du XXème siècle marque en Europe une ouverture des esprits à l’art oriental et extrême-oriental, en particulier à travers les Expositions Universelles qui vont durablement inspirer l’art et les joailliers parisiens. La Chine, le Japon, l’Inde, la Perse et le Moyen-Orient alimenteront avec richesse ce nouveau voyage spirituel et stylistique.

Dans le contexte de cette ouverture, le Musée des Arts Décoratifs consacre en 1903 une exposition aux arts dits « musulmans », qui constituera une découverte fondatrice pour Louis Cartier, fasciné par les formes et les motifs. Dès lors, les dessinateurs de la Maison sont vivement incités à s’y intéresser et le catalogue de l’exposition prend place dans la bibliothèque dite « des dessinateurs ».
Ces ouvrages ainsi que les objets d’art islamique que collectionnait Louis Cartier (miniatures persanes, objets d’Inde et d’Egypte) ont constitué une source d’inspiration fondamentale pour les créateurs de la Maison. L’exposition permet de les découvrir, du moins en partie, plusieurs pièces ayant pu être réunies pour la première fois depuis la dispersion de la collection.

Bague platine, rubis coussin 3,03 carats, diamants  Amélie Garreau © Cartier

 

Précurseur de l’Art déco ?

Ainsi, les motifs de grillage, de carrés et de damiers qui apparaissent dans les créations des ateliers dans les années 1910 traduisent une fusion de deux inspirations, celle des arts de l’Islam et celle d’un nouveau courant qui prendra bientôt le nom d’Art déco. Lignes épurées et graphiques, symétrie, abstraction séduisent Louis Cartier, peu adepte des courbes naturalistes de l’Art nouveau. Bien avant que l’appellation Art déco n’apparaisse, le joaillier développe dès 1904 des pièces dont les lignes s’inspirent des compositions géométriques typiques des arts de l’Islam découvertes au travers des livres d’ornements et d’architecture.
Cette géométrie abstraite reste l’une des signatures majeures du style de la Maison.

Inspiration naturaliste

Une autre veine d’inspiration, éloignée de l’Art déco, venue du monde iranien et des arts du livre amène les créateurs à reprendre des motifs anciens, originaux (mandorles, palmettes, fleurons, rinceaux, sequins, ondulations, écailles…), à les décomposer et les recomposer pour donner lieu à de nouvelles créations dont l’origine est parfois impossible à retracer. Grâce à de nouvelles associations de couleurs et de matières, mariant le lapis lazuli et la turquoise, associant le vert du jade ou de l’émeraude au bleu du lapis lazuli ou du saphir, Louis Cartier va créer son célèbre « décor de paon ».

Si le Musée des Arts Décoratifs ne révèle pas encore les pièces qui seront exposées, ceux qui ont eu la chance de visiter l’exposition The Art of Cartier au Musée Thyssen-Bornemisza à Madrid en 2012* ont pu voir quelques-unes de ces pièces exceptionnelles inspirées par l’art de l’Islam. Parmi celles-ci, une boite à cigarettes ornée d’une miniature figurant le buste de Shah Jahan, une autre entièrement émaillée de motifs floraux, une boîte à poudre en fines boules de turquoise et motif d’éléphant dans un zellige, un briquet au décor émaillé de fleurs et d’oiseaux typiquement iranien, etc…

Influence indienne

Lorsque Jacques Cartier, le frère de Louis, se rend en Inde en 1911, afin de développer la clientèle des maharajahs, il revient à Paris avec des bijoux anciens et contemporains qui seront revendus en l’état ou transformés. Mais surtout, il rapporte de ses voyages un style de glyptique typiquement indienne qui consiste à graver les pierres précieuses de motifs de fleurs, de feuilles, de palmettes. Ces pierres précieuses gravées et assemblées en mélange de couleurs donne un nouveau ton au bijou et ce langage joaillier inhabituel connaîtra un vif succès. Développé sous la direction artistique de Jeanne Toussaint, il prendra le nom de Tutti Frutti dans les années 70, devenant une signature emblématique et intemporelle de Cartier.

L’exposition Des Grands Moghols aux Maharajahs Joyaux de la collection Al Thani – Grand Palais, Paris, 2017 donnait quelques exemples d’émeraudes gravées magnifiques, entre autres avec des citations du prophète Mahomet.
Dépassant l’art de l’Islam et l’englobant en même temps, l’inspiration indienne de Tutti Frutti continue d’imprégner le style de Cartier (formes, couleurs, gravure des gemmes, bestiaire).

Orient et Extrême-Orient, une inspiration ancienne chez Cartier

Les sources d’inspiration exotiques dans le style de Cartier sont anciennes. Louis Cartier, voyageur, collectionneur et grand amateur d’art oriental, a toujours cherché à enrichir le style de la Maison avec les motifs éclectiques des cultures qu’il admirait et qui étaient aussi celles de ses clients.
L’art préislamique égyptien a aussi marqué l’histoire de la joaillerie en Occident, notamment depuis la campagne d’Egypte de Napoléon en 1798 et plus tard les fouilles de la tombe de Toutankhamon en 1922. Ces découvertes suscitèrent de nouvelles voies créatives. Louis Cartier, qui possédait un exemplaire de « La description de l’Egypte » rédigé suite à l’expédition de l’Empereur, y puisa quelques sources d’inspiration.

En 1913 se tient à la boutique de New York sur la 5ème avenue l’exposition « Bijoux créés par MM. Cartier, inspirés par l’art des Indes, de la Perse, de l’Arabie, de la Russie et de la Chine », précurseur d’une longue suite d’événements au cours de l’histoire du joaillier, retraçant les influences de l’Orient et de l’Extrême -Orient. 

* « The Art of Cartier », catalogue d’exposition, Musée Thyssen-Bornemisza, Madrid (2012) 

Catalogues des expositions Cartier  

Isabelle HOSSENLOPP – Publication juin 2021


Les photos sont la propriété de la Maison Cartier. Toute reproduction de texte et photos est interdite.

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