Luxe et génération Y

Rebelles, indépendants, hyper connectés, les futurs clients du luxe sont difficiles à capter

Rebelles, indépendants, hyper connectés, les futurs clients du luxe sont difficiles à capter

Dans leur ouvrage La génération Y et le luxe*, deux publicitaires, Eric Briones et Grégory Casper, mènent une réflexion fouillée, appuyée sur une étude et de nombreux exemples, de l’attitude des jeunes face au luxe. La génération Y, c’est l’ensemble des jeunes de 18 à 30 ans qui composent la nouvelle vague née de parents baby boomers. Pourquoi Y ? Le terme vient de l’anglais Y (prononcer why) qui signifie « pourquoi ». C’est justement une génération qui questionne beaucoup, qui est curieuse et remet en question les acquis. Pour avoir été choyée et très protégée, on croyait la génération Y insouciante et préoccupée de futilités. C’est en fait une génération angoissée, inquiète de l’avenir, qui ne se fait pas d’illusion.

Sans illusion et sans complexe

Elle est décomplexée vis-à-vis du luxe qu’elle considère comme une récompense, un ressourcement, un plaisir. Pour autant, le luxe doit se calquer sur leur univers où l’humour, l’autodérision, la mise en scène et l’appartenance au clan sont les nouvelles valeurs. Rebelles, hyper connectés, sans cesse à la recherche de nouveautés, les Y sont difficiles à capter et exigeants dans l’approche des marques. Pour appartenir à leur monde, celles-ci doivent reprendre leurs codes, utiliser toutes les ressources du numérique interactif, avoir une fun attitude tout en ayant de solides fondements. Burberry est souvent cité en exemple pour avoir su mixer contact physique et performance digitale dans sa boutique londonienne de 2 500 m2. Les Y attendent des marques qu’elles adoptent une approche ludique, informent et démontrent.

L’humour n’interdit pas la profondeur : le storytelling plus vivant que jamais

Car cette LOL génération a désacralisé le luxe d’hier et demande des preuves. Des preuves sur le prix tout d’abord, sur l’envers du décor, c’est-à-dire la qualité intrinsèque du produit de luxe, la fabrication et tous les ingrédients qui justifient la rareté. Le storytelling, c’est-à-dire la façon dont les marques racontent leur histoire et positionnent leur identité, garde toute son importance à leurs yeux. Ils sont demandeurs d’information, de connaissance, de codes fortement identifiables qu’ils pourront s’approprier. L’éthique, la responsabilité, le respect de l’environnement font partie des données de base, elles ne se discutent même plus.

Cette transparence se retrouve dans la façon de communiquer des Y. Ils sont à la fois bavards et partageurs sur les réseaux sociaux de leurs coups de cœur les plus intimes mais ils peaufinent leur mise en scène dans une forme de « starisation » de soi. Hédonistes et individualistes, ils ont peu le sens des convenances et de l’autorité et revendiquent leur propre style pour émerger de la foule. Le luxe est un élément essentiel de cette starisation, une preuve de goût ultime. Pour y accéder, ils sollicitent des marques des efforts sur les prix tout en exigeant qualité, créativité et possibilité de créer leur look sur mesure grâce aux conseils des vendeurs. C’est ce que les auteurs appellent le « self branding ».

Luxe n’est plus synonyme de prix cher mais plutôt de style. Hermès, avec ses boutiques éphémères, l’animation de son site, ses films à la fois drôles et très léchés, ses petits messages sous forme de dessins animés amusants ou Chanel avec ses 10 films Inside Chanel riches d’un storytelling zappeur et stylé sont totalement en adéquation avec la cible Y.

* La génération Y et le luxe, Eric Briones et Grégory Casper – Ed. Dunod

Isabelle Hossenlopp  Parution l’Officiel Horlogerie Bijouterie

Crédits photos : tous droits réservés

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